Dans un monde où l’on triture les pixels jusqu’à l’obsession et où l’intelligence artificielle prétend sublimer nos pathétiques clichés de vacances, une rebelle de l’objectif envoie valser ces illusions avec une insolente fraîcheur.
Vous vous demandez sans doute qui est donc cette rebelle des temps modernes, cette frondeuse qui se fout royalement des paillettes du numérique ? Eh bien, accrochez-vous, on parle ici d’Elizabeth Herman, alias Elizerman pour les aficionados de la photo… et pas de doute, elle, c’est du costaud ! Photographe pure souche de Bergerac, cette tornade créative a dans une autre vie écumé les quatre coins du globe avec son fidèle Leica et son antique Rolleiflex, balançant ses visions singulières à Télérama, Libé, Sud Ouest et bien d’autres canards… sans oublier une ribambelle d’expositions… Et devinez quoi ? Après avoir posé son regard là où la lumière daigne se pointer, elle a décidé de poser ses valises au pays de l’Homme… et de la Femme, bien entendu !
Du coup, zou, on pousse la porte de son vaste atelier, aux allures de loft, situé à Périgueux. Pénétrer dans ce lieu, c’est plonger tête la première dans un univers énigmatique et se demander où diable on a bien pu foutre les pieds. Diantre ! Est-ce une photographe ou une alchimiste des émulsions ? Les étagères regorgent de bouteilles d’agents chimiques, rappelant plus un laboratoire clandestin qu’un studio photo traditionnel. Pourtant, en y regardant de plus près, on découvre des chambres photographiques, ces mastodontes d’un autre âge, et une myriade d’objets mystérieux dont seuls les initiés de la photo d’antan pourraient deviner l’utilité.
Autre époque, autre style… En effet, Madame s’éclate désormais avec tout un arsenal de techniques photographiques de la vieille école : cyanotype, bromoil, collodion humide… autant de procédés imaginés par les pionniers de la photographie. Des techniques qui demandent un vrai savoir-faire en matière de chimie et qui, loin des standards lisses et uniformes des photos numériques, capturent des nuances de lumière et d’ombre avec une poésie intemporelle. Son dada ? Le collodion humide, créé en 1851, un ancêtre du Polaroid en somme. Avec une maîtrise chimique qui ferait pâlir d’envie Marie Curie, elle prépare ses mixtures (parfois dangereuses, à garder loin des gosses) pour concocter ces « Polaroids préhistoriques » sur plaques métalliques, les fixant ensuite à ses chambres photographiques avec une précision d’horloger.
Outre la chimie et la poésie, ce qu’elle adore dans le collodion humide, c’est l’instantanéité du procédé… On shoote, on patiente un peu, et bam on a le résultat… (vous nous direz qu’avec les photos numériques c’est pareil en plus rapide… ouais, beh franchement le résultat est incomparable les gars… car l’instantanéité du collodion humide donne à chaque cliché une profondeur et une texture inimitables, une richesse de détails et une tonalité que les pixels modernes n’atteindront jamais). Ok… La technique maîtrisée, c’est bien joli, mais encore faut-il savoir quoi en faire… Et pour vous répondre, Elizabeth carbure à l’émotion.
Ses sujets de prédilection ? Le portrait, pour son côté direct, brut et sans chichi… elle aime les « sacrées gueules »… mais autre facette, elle shoote également les paysages, pour leur charme bucolique et mélancolique, où elle magnifie l’eau, les rivières, les levers de soleil et les brumes matinales… sans oublier les fleurs, comme des roses et des arums. Bref, avec Elizerman, la photographie retrouve ses lettres de noblesse et un grain de folie inimitable. Le résultat ? Voyez par vous-même… une fois plongé dans son univers, on comprend que pour Elizabeth Herman, la frontière entre la photographie et la magie de l’instant est plus mince qu’une feuille de papier à cigarette. Chaque cliché est le fruit d’une alchimie subtile entre lumière, composition et une bonne dose de mystère, faisant d’elle une véritable maîtresse dans l’art de capturer l’instant éphémère et de le transformer en éternité visuelle.
(Alors oui, temps que nous y sommes… pendant que certains se tapent des selfies retouchés à la truelle, Elizerman, elle, capte des âmes et des moments avec une insolence qui fait du bien. Parce qu’au fond, l’art de la photographie, c’est peut-être bien de savoir dire merde à la facilité…)
Atelier photographique ELIZABETH HERMAN
5 rue des Mobiles – Périgueux
Tel : 06 03 12 35 00
Mail : elizerman@wanadoo.fr
Instagram : elizermanphotography
Par Ophélie Pessoa
Photo principale : Dreaming of you – Technique collodion sur aluminium 4×5 ©Photo Elizabeth Herman