Il y a vingt ans, Alain Roux a acquis une maison de maître en ruine. Sa rénovation est devenue le projet d’une vie, avec un objectif : lui rendre son âme tout en la transformant en agréable maison contemporaine. Soucieux de respecter le bâti ancien, il suit les préceptes de l’association Maisons Paysannes de France, qui l’a aiguillée dans cette restauration exceptionnelle.

Retaper une maison ancienne est un rêve partagé par beaucoup, mais rares sont ceux qui le poussent aussi loin qu’Alain Roux. En 2001, cet amoureux des vieilles pierres et sa femme ont acheté une ruine dans un village à une vingtaine de kilomètres à l’est de Périgueux. La demeure était abandonnée depuis dix ans et les ronces grimpaient jusqu’au toit. Derrière la végétation, pourtant, Alain a perçu le potentiel de cette maison de maître du début du XVIe siècle, à laquelle on avait accolé au XIXe un corps de ferme. Le tout semblait prêt à s’écrouler. Difficile à croire, quand on se tient face à cette magnifique propriété, qui tient en partie son cachet d’un bel escalier en pierre extérieur menant à une galerie couverte appelée bolet.

Les travaux titanesques n’ont pas découragé ce bricoleur émérite proche de la retraite, qui cherchait de quoi s’occuper l’esprit et les mains. Il s’est lancé dans un chantier qui semble ne jamais devoir finir : deux décennies plus tard, le couple n’a toujours pas emménagé ! Il faut dire que l’homme, qui va fêter ses soixante-treize ans, réalise les travaux quasiment tout seul, par souci d’économie, mais aussi parce que certains des artisans se sont défilés face à la complexité du projet. Alain a placé la barre haut, guidé par une exigence : restaurer sans dénaturer. Il a en cela appliqué les principes et conseils de Maisons Paysannes de France, une association qui aide les propriétaires à rénover les maisons traditionnelles sans trahir leur histoire ni leur architecture. Elle lui a d’ailleurs décerné le prix Patrimoine et Architecture René Fontaine en 2021 (1).

Alain a placé la barre haut, guidé par une exigence : restaurer sans dénaturer.

Alain n’a utilisé que des matériaux cohérents avec le bâti. La charpente a été reconstruite à l’identique en chêne et châtaignier. Toutes les menuiseries ont été réalisées sur mesure. Les pierres, poutres et lauzes en bon état, ont été conservées, et ce qui n’a pas pu l’être a été remplacé par des matériaux de récupération. Alain a écumé les petites annonces pour chiner un linteau de cheminée, des tuiles, du pisé ou encore une porte en fonte pour le four à pain du XIXe qu’il a bien sûr réhabilité. Dans l’ancienne cuisine, il a remis au jour l’évier en pierre d’origine et enlevé une fenêtre disgracieuse qui avait été ajoutée. Sa seule concession à la modernité a été la percée de baies vitrées dans l’ancien appentis transformé en cuisine. Mais il a trouvé une solution pour que l’aspect extérieur ne tranche pas avec le bâti ancien, en intégrant un colombage de bois sur les surfaces vitrées.

En vingt ans, mû par une énergie inépuisable, Alain a abattu un travail gigantesque. Rien que le débroussaillage a duré deux ans. Il s’est, entre autres exploits, attelé à faire rouler des poutres depuis le jardin puis à les mettre en place avec un palan, seul ! Ce passionné a aimé prendre son temps : « Avec de la volonté, on peut arriver à tout, c’est ma devise. C’est aussi une satisfaction par rapport aux gens du village, parce qu’ils me prenaient un peu pour un fou ». Il voit enfin le bout et espère emménager avec son épouse l’année prochaine…

À PROPOS

L’association Maisons Paysannes de France a été créée en 1965 et compte 80 délégations. Elle est représentée depuis une quarantaine d’années en Dordogne. Son objectif est la sauvegarde du patrimoine rural. Elle a un rôle de conseil gratuit auprès des particuliers et des collectivités dans leurs projets de rénovation, aménagement ou transformation d’un bâti ancien. Elle organise également des ateliers et journées découvertes pour sensibiliser aux spécificités de ce type d’habitat.

(1). Le prix Maisons Paysannes de France René Fontaine récompense depuis 1985 les plus belles restaurations du bâti ancien, en tenant compte des critères suivants : respect de l’architecture d’origine, utilisation de techniques et matériaux traditionnels locaux, souci écologique, harmonie avec le bâti existant et le paysage.


Pour en savoir plus :

06 38 79 69 15
www.maisons-paysannes-dordogne.blogspot.com
dordogne@maisons-paysannes.org


Par Maéva Louis
Photos : © Déclic & Décolle